05 mars 2012

Discrimination hommes/femmes, Anne Quélennec, psychologue du travail

Vaste sujet, question complexe, qu'en est-il de la discrimination homme-femme en Europe ?

1-Etat des lieux
a-Salaire
D'abord, un constat: il n'existe aucun pays dans lequel existerait l'égalité salariale. Dans l'ensemble des pays du globe, les femmes sont confrontées au temps partiel, au travail non qualifié, au chômage, aux faibles salaires et à la discrimination. En Europe, les femmes touchent en moyenne 17% de moins que les hommes avec de nombreuses disparités:


b-Orientation scolaire
Alors que les études sont unanimes et montrent que les filles ont globalement de meilleurs résultats scolaires que les garçons, on observe dès la fin de la seconde une première séparation nette entre garçons et filles qui aura des répercussions sur leur avenir jusqu'à la fin de leur vie. En effet, la fin de la seconde générale marque un passage important, le choix de la filière pour le baccalauréat. La majorité des filles s'orientent vers la filière littéraire alors que les garçons privilégient la filière scientifique. La filière générale la moins marquée par un genre est probablement la filière économique et sociale. Deux ans plus tard arrive le second choix important, celui des études: filières dites d'excellence ou sélectives ou bien parcours court et professionnalisant, choix avec un objectif à long terme défini par une carrière visée ou choix à court terme privilégiant une matière appréciée. Même si les possibilité de rebondir ou de rectifier le tir existent, une bonne partie de l'avenir des jeunes Français est définie par le choix du diplôme visé et obtenu. On s'aperçoit ainsi que malgré un taux de réussite au bac supérieur pour les femmes, celles-ci sont paradoxalement moins présentes en classes préparatoires et consécutivement au choix de la filière, on retrouve plus d'hommes dans les prépas scientifiques (69,5% vs 30,5%) que dans les prépas littéraires. De même, à l'université, on compte plus de femmes dans les filières « lettres et sciences humaines » ( 70% vs 30%) et plus d'hommes dans les filières de l'ingénierie et de l'informatique (les IUT attirant par exemple moins de 10% de femmes pour le seul domaine de l'informatique).

Comme précisé plus haut, l'orientation scolaire en général et le diplôme obtenu en particulier vont influer sur l'ensemble des gains d'un individu. Observons le tableau suivant:

Source : Mainguené A., Martinelli D., « Femmes et hommes en débuts de carrière, les femmes commencent à tirer profit de leur réussite scolaire », in Insee premières, n° 1284, février 2010.

On peut faire plusieurs constats:
Les carrières privilégiées par les femmes sont, à quelques exceptions près, celles qui génèrent le plus de chômeurs. De même, ces carrières sont aussi celles qui emploient le plus de personnes à temps partiel. En revanche, on s'aperçoit que quels que soient la filière et le niveau de diplôme choisis, les femmes sont systématiquement moins rémunérées que les hommes.

Enfin, on constate que plus de la moitié des femmes se retrouvent dans 12 familles de métiers sur les 87 familles recensées. Certains de ces métiers sont occupés quasi-exclusivement par des femmes et sont peu gratifiants (moins d'autonomie, moins de management, moins bien rémunéré, d'après Amira S., « Les femmes occupent des emplois où le travail semble moins épanouissant », in Dares analyses n° 082, décembre 2010:

Sources : enquêtes emploi 2008 et 2009, Insee, moyenne annuelle des années 2008 et 2009, calculs Dares

C-Carrière
Le démarrage de carrière va ensuite avoir un impact sur l'évolution professionnelle. Commençons par la question de la formation continue. La formation continue concerne surtout les cadres et les professions intermédiaires, et plutôt le secteur public que le secteur privé. Néanmoins, on constate ici aussi que les hommes en bénéficient davantage que les femmes, toutes carrières confondues. Concrètement, il semble que plus une femme aura démarré haut (idéalement dans le service public) plus elle aura la chance de pouvoir évoluer (62% des femmes cadres de la Fonction Publique bénéficient de la formation continue contre 21% des femmes ouvrières dans le secteur privé).

Source : enquête Formation continue 2006, volet complémentaire de l’enquête Emploi 2006, traitement Céreq, Céreq-Insee.

A ce détail près que l'Observatoire des inégalités constate un plafond de verre dans le secteur public. Ainsi, si les femmes sont plus nombreuses que les hommes dans la fonction publique (59% de femmes, armée incluse), on constate que le rapport s'inverse de façon très accentuée dès qu'il s'agit de postes de direction.

Concernant la question des femmes dirigeantes dans le secteur privé, les chiffres en France sont assez navrants, ainsi que le révèle une autre étude de l'Observatoire des Inégalités:

Une femme a plus de chance de diriger un petit commerce qu'une grande entreprise de l'industrie. (1 chance sur 5 contre 1/10 environ). Le terme chance est d'ailleurs ici inadapté car comme nous le verrons plus tard, la chance n'a rien à voir avec c'est résultat.

Dans le même esprit, constate que les femmes sont sous-représentées dans les conseils d’administration des entreprises cotées en Bourse. L'adoption d'une loi le 13 janvier 2011 imposant des quotas de 40% de femmes d'ici à 2017 pourrait changer la donne, mais l'observation des chiffres de 2009 démontre qu'on est encore loin du compte.

On peut d'ailleurs ici faire une petite aparté pour préciser que les femmes concernées sont parfois les mêmes d'une entreprise à l'autre, et qu'il est plus facile de s'y hisser quand on est fille ou femme de ...

La discrimination homme femme peut donc parfois être diluée par la naissance ou le mariage, mais c'est un autre débat...

d-Recrutement
Le recrutement est l'un des éléments clés de la discrimination. L'Observatoire des Inégalités propose dans ce domaine également un tableau particulièrement éclairant sur cet état de fait:

Source : Discrimination à l’embauche : une étude d’audit par couples dans le secteur financier », Pascale Petit - Revue Economique, 2004.

A 25 ans, une femme subira de la discrimination pour accéder à des postes qualifiés (ce qui aura des conséquences sur son parcours professionnel). Sur le site Wikipedia, on ajoute qu'  « une femme de 32 ans mariée et ayant 3 enfants a 37 % de chances en moins d’être convoquée à un entretien d’embauche. Les candidatures de femmes avec enfants sont clairement repoussées sauf pour certains types d’emplois. »
De plus certains secteurs, à l'instar du BTP, de la sidérurgie, de l'automobile, de la logistique continue de faire preuve de machisme et de fermer certains postes aux femmes de façon non officielle puisque non autorisée...

e-Physique
Un autre facteur de discrimination existant dans le recrutement est lié au physique du candidat. Si cette discrimination concerne les deux sexes, il faut néanmoins relever quelques spécificités subies par les femmes.
Une étude du Telegraph révèle ainsi qu'en Australie, sur un échantillon de 13000 femmes, on s'aperçoit que les blondes, souvent perçues comme plus séduisantes ont un salaire supérieur de 7% à celui des autres femmes, sans que d'autres facteurs puissent interférer.
Une autre étude, menée par Adia indique que si les hommes sont plutôt jugés sur leur look et leur façon de parler, les femmes sont directement jugées sur leur physique (plus difficile à changer), et sanctionnées lorsqu'elles sont de fort gabarit, ce qui n'est pas le cas des hommes, ou du moins de façon moins prononcée.
Plusieurs études (par exemple celle de Dipboye, Arvey et Terpstra, 1977) démontrent que le physique intervient également dans la décision d'embauche.

f-Machisme et harcèlement sexuel
Le machisme joue lui-aussi un rôle dans le fait qu'un homme est souvent jugé plus apte qu'une femme à assumer des responsabilités et à diriger. Le modèle économique qui dirige actuellement nos sociétés impacte directement les modes de management. Christophe Dejours explique ainsi que pour être un manager reconnu par ses pairs (hommes ou femmes), il faut « en avoir »...Concrètement, il ne faut pas faire trop dans l'empathie et les sentiments, accepter les coups bas pour monter dans la hiérarchie, ne pas hésiter à licencier quand c'est nécessaire, pour répondre à ces clichés prisés dans certaines entreprises du cow-boy ou du tueur. Rien que dans ces termes, on comprend à qui ces postes s'adressent et les rares femmes qui y accèderont auront beaucoup à prouver, souvent d'ailleurs plus que les hommes, notamment qu'elles « en ont », elles aussi.
Le machisme génère également du harcèlement sexuel. Il s'agit d'abord de définir ce qu'est le harcèlement sexuel. En France, la définition est très restreinte et ne concerne que les agissements en vue d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d’un tiers.
Penchons nous sur ce que les canadiens considèrent comme du harcèlement sexuel, nous verrons alors combien notre culture admet des formes de harcèlements sexuels qui ne seraient pas tolérées dans d'autres pays en s'appuyant sur le contenu du site canadien du Centre Victoria pour les femmes:

  • Le harcèlement sexuel verbal
Cette forme de harcèlement sexuel comprend les blagues sexistes, grossières ou dégradantes; les remarques sur l’apparence physique; les remarques sur la vie privée telle que : « est-ce que ton copain te satisfait sexuellement? »; l’usage de termes d’affection comme « ma poule, ma biche, cocotte, etc. »; l’utilisation de confidences insinuantes de la part du harceleur telles que « ma femme ne me satisfait plus! »; l’offre d’invitations répétées de toutes sortes; l’expression de propositions sexuelles explicites; l’emploi de promesses voilées ou carrément ouvertes, en échange de faveur sexuelle du genre « si tu voulais, tu pourrais recevoir une augmentation salariale », etc.

  • Le harcèlement sexuel non verbal
Cette forme de harcèlement sexuel comprend les sifflements, les regards à connotation sexuelle, l’affichage de matériel dégradant ou pornographique, les signes explicites à connotation sexuelle (par exemple, se pourlécher les lèvres en signe d’invitation sexuelle), la présence continuelle du harceleur, des notes à caractère sexuel ou sexiste, etc.

  • Le harcèlement sexuel physique
Cette forme de harcèlement comprend des frôlements intentionnels qui paraissent accidentels, des attouchements et des touchers physiques tels que donner des tapes sur le derrière, chatouiller, pincer, se faire embrasser, se faire coincer dans un coin, etc.

Une étude a été menée en France à la demande du Ministère du Travail et du service du droit des femmes entre 1985 et 1990. Il s'avérait que le harcèlement sexuel était plus fréquemment rencontré dans le secteur privé et les très petites entreprises. Le cas le plus classique est une femme victime de son supérieur hiérarchique. Le plus souvent, il s'agit simplement d'abus de pouvoir ou d'intimidation, parfois d'un glissement de simple avance à insistance lourde... Ce harcèlement se retrouve à tout niveau de la hiérarchie, et à tout moment de la carrière, parfois dès le recrutement, parfois comme instrument de brimades. Si nous avons parlé là des cas les plus fréquent, le harcèlement sexuel peut aussi concerner les hommes ou se retrouver dans les relations entre collègues.

g-Harcèlement moral et risques psychosociaux
L'un des auteurs clés du harcèlement moral est une femme. Il s'agit de Marie-France Hirigoyen, l'une des pionnières de ce sujet. Dès 1998, celle-ci se penchait sur la question et cherchait à répondre à une simple question: le harcèlement est-il sexué ?
Pour la plupart des études, la réponse est claire, c'est oui, avec 70% de femmes contre 30% d'hommes. Comme nous venons de le voir, les réflexions machistes ou à connotation sexuelle touchent plus souvent les femmes, et sont l'une des composante du harcèlement moral. Mais ce n'est pas la seule explication. On s'aperçoit dans un premier temps que ce chiffre a tendance à baisser dans les pays scandinaves ou en Allemagne, plus soucieux de l'égalité, et augmente dans les pays latins. La vision de la société concernant la place des femmes dans le monde du travail joue directement un rôle.
Enfin, il faut savoir que les personnalités qui harcèlent sont souvent assez lâches et se déchaînent lorsque le harcelé est en position de faiblesse, ce qui est souvent le cas pour les femmes seules, à plus forte raison quand elles ont des enfants à charge et que leur travail leur est indispensable : elles peuvent moins se permettre de claquer la porte.

h-Temps partiel et pauvreté
L'une des plus grandes disparités s'observe au niveau de la durée de travail. Lorsque l'on compare le pourcentage d'hommes ou de femmes à temps partiel, le constat est alarmant.
En 30 ans, les femmes sont passées de 17 à 30% de salariés à temps partiel, les hommes sur la même durée sont passés de 2,5 à 6%. Plus concrètement, il faut comprendre qu'aujourd'hui, 82% des personnes travaillant à temps partiel sont des femmes et que ce temps partiel est subi. Il s'agit plus souvent d'un sous-emploi subi qu'un choix de convenance. Au même titre que la fixation du salaire discrimine les femmes, leurs sous-emploi impacte directement leur pouvoir d'achat et leur autonomie.
Source: Observatoire des Inégalités

i-Retraites
Inutile de appesantir dans cette rubrique, il faut juste constater que les cotisations des femmes sont bien inférieures à celles des hommes: congé parental d'éducation, manque de formation et d'évolution de carrière, précarité et bas salaires interagissent pour ne proposer que de maigres pensions aux retraités qui, sans conjoint ou sans pension de réversion peuvent se retrouver en grande précarité. Trois quarts des personnes percevant le minimum vieillesse sont des femmes et le montant des retraites des femmes correspond à 42 à 48% de celui des hommes (825€ contre 1426 € en moyenne)...

2-Explications
a-Domination masculine
Ce concept est le titre d'un ouvrage du sociologue,ethnologue et philosophe Pierre Bourdieu. La domination masculine est un ensemble de mécanismes plus ou moins conscients, plus ou moins volontaires qui vont ancrer solidement dans l'esprit des hommes, mais également dans celui des femmes qu'hommes et femmes sont totalement différents et que cette différence fait de l'homme un être fort et de la femme un être faible (un peu dans l'esprit des « hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus ») et cela depuis la nuit des temps (les hommes chassent, les femmes préparent les repas dans la caverne).
Cette domination est insidieuse, on la retrouve partout, y compris là où on ne l'attend pas... Il suffit de voir la place de la femme et l'image qu'on en donne dans la publicité, la morale notamment en lien avec la sexualité, plus permissive pour les hommes (le collectionneur de femmes est un séducteur, la collectionneuse d'hommes une garce) ou la répartition des tâches dans les couples. Une des formes de cette domination se retrouve dans l'habillement. Prenons un exemple que nos cultures comprend immédiatement, celui de la burqa. Il ne s'agit pas ici de définir si son port doit être ou non accepté, mais de rappeler que beaucoup considère que cette tenue constitue une sorte de prison qui limite et contrôle les mouvements de celles qui la portent. Ce sujet a d'ailleurs beaucoup ému la classe politique au nom de la liberté des femmes. Prenons alors d'autres exemples: que penser des talons hauts qui empêchent de courir ou marcher normalement, des jupes courtes qui interdisent certaines poses ou activités, les ongles manucurés qui interdisent certains gestes ? Ces autres prisons sont culturellement admises même si elles fonctionnent sur le principe même de la burqa. Et comme la burqa, ce sont souvent les femmes qui insistent quant à la liberté de les choisir. On retiendra en tous cas que plusieurs cultures prônent des vêtements/accessoires qui réduisent la mobilité des femmes, les affaiblissant.

b-Métiers, études, littérature et jeux sexués
La domination masculine commence tôt, il suffit, pour s'en convaincre, de feuilleter un catalogue de jouet: à la petite fille, on proposera poupons, dînette, robe de princesse, accessoires de ménage, aux garçons, les activités scientifiques, mécaniques ou sportives. Le conditionnement se poursuit dans l'illustration des métiers dans les ouvrages pour enfants: si le pompier, le médecin ou l'ingénieur sont des hommes, l'infirmière, la caissière, la serveuse ou la puéricultrice sont rarement représentées par leur homologues masculins. L'éducation va ensuite renforcer ou interdire des comportements sexués: on demande au garçon d'être courageux et de ne pas pleurer, on tolérera les coquetteries de la fillette.

c-Vie privée et vie professionnelle: imbrication
De nombreux ouvrages abordent la question de la conciliation travail des femmes et maternité. Pour ceux que le sujet intéresse, on peut s'intéresser à l'ouvrage d'Isabelle Fontaine "Oser Devenir Mère et Réussir sa Vie Professionnelle" - "Le guide pour toutes celles qui veulent concilier carrière et vie personnelle", sorti aux Editions Leducs en janvier 2012ou s'appuyer sur le travail d'une de mes anciennes enseignantes, Laurence Cocandeau-Bellanger, dans son ouvrage: "Femmes au travail, comment concilier vie professionnelle et vie familiale ?" . Il en ressort que la carrière des hommes et celle des femmes ne sont pas comparables. Les modèles qui servent à représenter la carrière des femmes en psychologie sociale sont beaucoup plus complexes car de nombreux paramètres sont à prendre en considération. En effet, contrairement aux hommes qui compartimentent hermétiquement vie professionnelle et vie de famille, les femmes imbriquent étroitement les deux en faisant varier l'importance qu'elles leur accordent selon les moments de sa vie et les modèles qu'elles se fixent. On s'aperçoit également, et ce n'est pas un scoop, que les tâches domestiques sont deux fois plus lourdes pour les femmes que pour les hommes. En charge également de l'élaboration des emplois du temps, des formalités d'inscription de la rentrée, des RV médicaux, des gardes d'enfants quand ils sont malades, des achats de vêtements, des fournitures scolaires, elles mènent parfois de front l'équivalent de deux journées de travail, ce qu'ont bien compris les employeurs. Tant que les mentalités ne changeront pas, les hommes ne se rendront pas plus disponibles pour leurs enfants, ce sont donc les femmes qui risquent d'être moins souples sur leurs horaires, moins tentées par des heures supplémentaires, des déplacements, des pics d'activités, plus souvent absentes, raison pour laquelle ils préfèrent parfois privilégier la carrière des hommes, jugés plus fiables.

d-Manque de volonté politique: ce que dit la loi française
L’égalité de traitement entre les hommes et les femmes dans le travail implique le respect de plusieurs principes par l’employeur :
  • interdictions des discriminations en matière d’embauche,
  • absence de différenciation en matière de rémunération et de déroulement de carrière,
  • obligations vis-à-vis des représentants du personnel (élaboration d’un rapport écrit et négociation),
  • information des salariés et candidats à l’embauche et mise en place de mesures de prévention du harcèlement sexuel dans l’entreprise. 
Des recours et sanctions civiles et pénales sont prévus en cas de non respect de l’égalité homme-femme. En outre, dans les conditions précisées par le décret n° 2011-822 du 7 juillet 2011 cité en référence, les entreprises d’au moins 50 salariés seront soumises à une pénalité à la charge de l’employeur lorsqu’elles ne seront pas couvertes par un accord ou un plan d’action relatif à l’égalité professionnelle ; cette disposition entre en vigueur à compter du 1er janvier 2012 ou, pour les entreprises couvertes à la date du 10 novembre 2010 par un accord ou, à défaut, par un plan d’action destiné à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, à l’échéance de l’accord ou, à défaut d’accord, à l’échéance du plan d’action.
Alors que la loi française est claire, et que la première loi supprimant la notion de salaire dit « féminin » date de 1945, on constate que ces règles ne sont pas appliquées.
Une enquête, menée en région Centre relate que dans les entreprises de plus de 50 salariés, les obligations légales sont peu appliquées: les rapports exigés ne sont pas rédigés dans près d'un quart des entreprises et la loi n'est parfois même pas comprise.
De plus, au premier janvier 2010, l'INSEE dénombrait pas moins de 3 966 689 entreprises, pour 2190 agents de contrôles en 2009 (dont 767 inspecteurs et 1423 contrôleurs) d'après le Ministère du travail. 1 agent pour 1800 entreprises, c'est dire la pression qui pèse sur les entreprises quand on connaît le nombre de missions qui sont confiées à ces agents... Les entreprises n'ont vraiment pas de souci à se faire.
Enfin, la pratique est souvent plus complexe que la théorie. Comme nous l'avons vu précédemment, les métiers occupés par les hommes et les femmes sont souvent différents. Dans ce cas de figure, comment démontrer qu'il y a discrimination, la comparaison est compliquée.


3-Des exemples qui marchent
a-Québec
Au Québec, une loi pour l'équité salariale a été adoptée, celle-ci a décidé de mettre à plat l'ensemble des métiers et notamment de comparer des professions davantage occupées par des hommes, avec des professions privilégiées par des femmes en terme de responsabilités, d'efforts, de qualification ou de condition de travail. Par exemple, il peut être évaluer au sein d'un hôtel, qu'un portier et une femme de chambre ont une charge de travail similaire: leurs salaires doivent alors être alignés. La loi était également moins indulgente: En mai 2009, une modification de la loi leur a donc imposé non seulement de le faire au plus tard au 31 décembre 2010 - sous peine d'amendes et de versement d'indemnités aux salariés concernés -, mais également de payer rétroactivement à leurs salariés les ajustements d'équité salariale dus depuis 2001. Certes, ce fonctionnement semble complexe. Il en résulte néanmoins que les écarts de salaire sont passés de 16 à 13%.

b-la Norvège
En Norvège, en 2004, une loi a été adoptée, qui prévoit la dissolution des sociétés qui ne parviendraient pas à atteindre l’objectif fixé de 40% de femmes dans les conseils d’administration, avant le 1er janvier 2008. Cela semble inconcevable en France, mais la Norvège sert souvent de référence sur la question de l'égalité homme/femme est fut souvent un précurseur dans ce domaine.

c-Jurisprudence: un espoir en France
Dans son blog, Elsa Fayner relate un cas dont on a peu parlé mais qui peut redonner un peu d'espoir. Une DRH a porté plainte contre son employeur pour discrimination salariale en comparant son salaire à celui des autres directeurs de son entreprise. En juillet 2010, la chambre sociale de la cour de cassation a donné raison à la DRH, considérant que les postes étaient d'égales responsabilité et que le principe d'égalité se devait d'être appliquée. Une telle décision pourra très probablement, on l'espère, faire jurisprudence.

Anne Quélennec
Psychologue du travail

Sources:

  • Ouvrages:
Souffrance en France, Christophe Dejours
Le harcèlement moral dans la vie professionnelle, Marie-France Hirigoyen

  • Sites Internet:

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