Affaire Renault : quelles conséquences psychologiques pour les trois salariés ?
Article rédigé le 15 mars 2011 par Adeline Bertin (source)
Crédit photo: albertizeme / Flickr
Le procureur de Paris a écarté hier la thèse de l’espionnage au sein de Renault. L’enquête s’oriente désormais vers “une possible escroquerie au renseignement”. Trois cadres du technocentre de Guyancourt (Yvelines) ont été licenciés en janvier. Matthieu Tenenbaum et Michel Balthazard ont porté plainte contre X pour “dénonciation calomnieuse”. Bertrand Rochette a lui déposé plainte pour “diffamation non publique”.
Anne Quélennec, psychologue du travail, revient sur cette affaire et ses conséquences sur la psychologie des trois salariés.
Quelles peuvent être les conséquences sur la psychologie et le comportement en entreprise des trois anciens cadres de Renault ?
Les trois cadres accusés dans l’affaire clament leur innocence depuis le début. Cela fait mal, lorsque l’on est de bonne foi, que l’on aime son métier et son entreprise, de se retrouver au cœur d’une telle affaire. C’est extrêmement violent. Leurs visages et noms se sont étalés partout dans les médias, c’est une véritable humiliation publique. Depuis janvier, l’affaire Renault a sûrement eu des conséquences sur leur santé et psychologie. Cela peut se traduire par des troubles du sommeil, du stress additionnel, ou des troubles psychosomatiques.
Comment se gère un retour dans l’entreprise après une telle affaire ?
Partons de l’hypothèse où les trois cadres auraient envie de réintégrer Renault : si le constructeur automobile fait des excuses publiques, à la télévision par exemple, et si des indemnisations sont versées en réparation des dommages financiers et psychologiques, peut-être pourront-ils de nouveau travailler dans l’entreprise. Mais cela sera loin d’être parfait, car après avoir subi des accusations de cette ampleur, il y a une vraie perte de confiance des deux côtés. C’est comme dans un couple : lorsqu’un conjoint fait une crasse, l’autre peut toujours pardonner mais un malaise restera forcément entre les deux. Il faut voir aussi comment les collègues ont réagi à ces accusations. Peut-être que beaucoup leur ont tourné le dos.
De toute façon, je ne pense pas qu’ils auront envie de retravailler pour Renault. Je traite souvent les cas de harcèlement moral, proche d’un cas comme celui-ci, et je déconseille souvent de retourner travailler dans la même entreprise. Donc dans l’hypothèse où les trois cadres ne voudraient pas réintégrer Renault : travailler autre part est une possibilité. Cela dépendra de qui voudra les embaucher. Car ils ont dorénavant une étiquette, leurs noms et leurs visages sont connus, tout comme l’affaire à laquelle ils sont liés.
Quelles sont les conséquences sur la vie privée des cadres ?
Pour l’épouse et les enfants, c’est une épreuve de voir le nom de la famille dans les médias. La question est de savoir s’ils sont soutenus par leur entourage. Dans le cas des harcèlements moraux, la famille n’est pas toujours une aide, soit parce qu’ils ne comprennent pas, soit parce qu’ils n’ont pas envie d’en parler. Ce n’est pas facile à vivre, et les conséquences sur l’équilibre familial peuvent être lourdes. Les dommages sont donc multiples : il y a un préjudice moral, financier, psychologique et physique à réparer.
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Pour lire l’interview de Michel Balthazard, l’un des trois accusés, cliquez ici »
AB
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